La mise en place du net social en juillet 2023 a posé de nombreuses difficultés pratiques, notamment concernant le sort des cotisations frais de santé, prévoyance et retraite supplémentaire.

Malgré les précisions apportées par l’administration, les gestionnaires de paie se sont posé beaucoup de questions et ont dû faire preuve de pédagogie pour expliquer aux salariés le calcul de cette nouvelle ligne sur leur bulletin de salaire.

Quelques mois après la mise en œuvre, alors que l’on pensait le sujet derrière nous, le Bulletin Officiel de la Sécurité Sociale (BOSS) opère un réel revirement de doctrine, imposant aux gestionnaires de paie une remise à plat de tous les modes de calculs déjà mis en place.

L’ancien mode de calcul du net social et les conséquences pour les plus précaires

Rappelons que, dès 2024, le montant net social servira de base de calcul aux prestations sociales, notamment la prime d’activité et le RSA. Cette nouveauté impacte donc directement les salariés les plus précaires.

Or, dans le calcul du net social, doit être intégrée toute la rémunération entendue au sens large.

Ainsi, les indemnités de rupture (indemnité de licenciement, rupture conventionnelle…), bien qu’échappant aux cotisations sociales, entrent dans le net social. Autre exemple : les avantages en nature s’ajoutent au net social.

La problématique portait sur les avantages fournis par les employeurs concernant les contrats collectifs de protection sociale (frais de santé, prévoyance et retraite supplémentaire) : auparavant, seul le contrat de mutuelle sur un socle obligatoire et collectif n’avait pas d’impact sur le net social. Toutes les autres cotisations (prévoyance, retraite supplémentaire et régime facultatif ou optionnel de frais de santé) étaient réintégrées dans le net social pour la partie financée par l’employeur.

De ce fait, le montant des ressources déclarées via le net social était supérieur au montant que les allocataires avaient l’habitude de déclarer auprès des organismes. Cela aurait eu pour conséquence de faire diminuer significativement les prestations sociales associées, et d’impacter les salariés les plus précaires.

La remise à plat du BOSS

Depuis plusieurs mois, face au contexte d’inflation, certains dénoncent une injustice et des difficultés prévisibles pour les plus bas salaires.

Leur argument principal est le suivant : le fait pour un employeur de proposer à ses salariés une bonne protection sociale avec des garanties avantageuses ne saurait avoir pour conséquence de faire diminuer les prestations sociales des salariés les plus précaires.

C’est dans ce contexte politico-social tendu que l’administration a changé son fusil d’épaule : dans une mise à jour du BOSS du 14 novembre dernier, il est désormais acté que toutes les cotisations finançant des garanties collectives de protection sociale doivent être exclues du calcul du net social.

Ainsi la part patronale de ces cotisations ne doit plus être réintégrée dans le net social, et la part salariale doit être, comme toute les autres cotisations obligatoires, déduite du calcul du net social.

Le nouveau mode de calcul : une réelle équité ?

Cette nouveauté aura au moins le mérite de la simplicité pour les gestionnaires de paie.

Exit les questionnements sur le régime des contrats (obligatoire, facultatif, garanties collectives, option au choix ou imposée…) ; désormais tous les contrats sont traités de la même manière.

En revanche, cette mise à jour arrive quelques semaines seulement avant la date limite de fin de la période « de test ». Dès janvier 2024, les montants déclarés doivent impérativement être conformes (voire même dès décembre 2023 pour les employeurs en décalage de paie). Le délai pour modifier les paramétrages et valider les calculs est très court.

Mais, en poussant la réflexion, ces modalités de calcul simplifiées sont-elles vraiment justes pour les salariés ?

Imaginons deux salariés avec la même rémunération : le salarié A a souscrit au contrat de mutuelle de base pour un célibataire, le salarié B a souscrit au contrat de mutuelle avec des garanties optionnelles supplémentaires et des ayants-droits supplémentaires.

Les options souscrites par le salarié B sont précomptées sur son bulletin de salaire. La part salariale de sa cotisation mutuelle est donc largement supérieure à la part salariale de la cotisation mutuelle du salarié A.

Le nouveau mode de calcul du net social tient compte de toutes les cotisations salariales de mutuelle, même celles qui sont facultatives.

Ainsi, le net social du salarié A sera supérieur au net social du salarié B.

Monsieur A aura des prestations sociales plus faibles que Monsieur B, alors qu’ils ont la même rémunération, et que Monsieur B a souscrit de son propre chef à une meilleure prise en charge santé.

On peut s’interroger sur les conséquences de cette réforme en terme d’équité entre les salariés… Le droit social s’enrichissant des influences socio-politiques, l’avenir nous dira si le calcul du net social sera amené à évoluer au fil du temps.